COVID19 – Le terme de la suspension des délais de procédure fiscale est fixé

Malgré la prolongation de l’état d’urgence jusqu’au 10 juillet 2020, la fin de la période de suspension des délais est fixée au 23 juin, sauf pour les délais de contrôle fiscal qui sont suspendus jusqu’au 23 août.

1. De nouvelles ordonnances concernant les délais et procédures applicables pendant la crise sanitaire liée à l’épidémie de coronavirus viennent d’être publiées. Elles modifient notamment les ordonnances 2020-303, 2020-305, 2020-306 et 2020-326 du 25 mars 2020 que nous avions présentées au FR 18/20 inf. 1 p. 3.

Alors que ces précédentes ordonnances avaient prévu des mesures de prorogation ou de suspension des délais et d’adaptation des procédures dont le terme était défini par référence à la cessation de l’état d’urgence sanitaire, les nouvelles ordonnances déterminent pour ces mesures un terme fixe, indépendant de la date de cessation de l’état d’urgence. La prolongation de l’état d’urgence sanitaire qui vient d’être votée ( notre actualité du 13-5-2020) perd ainsi toute incidence sur les mesures concernées.

A noter : Comme l’indique le rapport au Président de la République sur l’ordonnance 2020-560, le contexte d’allégement du confinement et de reprise de l’activité, qui permet aux opérateurs de procéder aux actes et formalités prescrits par la loi, justifie la substitution d’une date fixe à la référence « glissante » fondée sur la fin de l’état d’urgence sanitaire.
Cette position rejoint la préoccupation du Conseil d’Etat qui, dans son avis du 1er mai 2020 relatif à la prorogation de l’état d’urgence, avait appelé le Gouvernement à un réexamen systématique et à une appréciation au cas par cas des nombreuses mesures dérogatoires au droit commun qui se trouvaient également prolongées.

La période juridiquement protégée cessera le 23 juin à minuit

2. L’article 1er de l’ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 qui avait posé le principe d’une prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire avait défini une période dite « période juridiquement protégée » couvrant les délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré.

L’article 1er, 1o de l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d’urgence sanitaire supprime la référence à la date de cessation de l’état d’urgence et fixe la date de la fin de la période juridiquement protégée au 23 juin 2020 à minuit.

Cette période s’étend donc du 12 mars au 23 juin inclus.

A noter : Compte tenu de la durée de l’état d’urgence initialement fixée à deux mois par la loi 2020-290 du 23 mars 2020, la période juridiquement protégée était à l’origine conçue pour prendre fin le 24 juin. La présente mesure revient donc quasiment à maintenir la durée de la période juridiquement protégée initialement prévue.

3. L’article 12 de l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020 prévoit par ailleurs que, lorsque le terme de la période d’application des ordonnances reste défini par référence à la cessation de l’état d’urgence sanitaire, ce terme peut, pour tenir compte de l’évolution de la situation sanitaire, être avancé par décret en Conseil d’Etat.

A noter : Le pouvoir réglementaire peut également intervenir pour mettre fin à des mesures dérogatoires autorisées par ordonnance en matière de procédure pénale.

Mais la suspension est prolongée pour le contrôle fiscal

4. En matière de contrôle fiscal, l’article 10 de l’ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 a prévu la suspension des délais non échus au 12 mars 2020 ou commençant à courir au cours de la période juridiquement protégée. La suspension concerne la prescription du droit de reprise de l’administration lorsque cette prescription est acquise au 31 décembre 2020. Elle concerne également les autres délais prévus par les différentes procédures de contrôle fiscal et applicables tant à l’administration qu’au contribuable (par exemple, délais relatifs à la durée du contrôle, délais concernant les propositions de rectification…).

5. L’article 1er, 4o de l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020 prolonge la suspension des délais prévus en matière de contrôle fiscal jusqu’au 23 août 2020 inclus, soit deux mois après le terme de la période juridiquement protégée de droit commun.

La période de suspension en matière de contrôle fiscal, qui court ainsi du 12 mars au 23 août 2020 inclus, représente une période de 165 jours, si l’on retient un décompte en jours comme le fait l’administration au BOI-DJC-COVID19-20.

Exemple —————————————————————————————————————

Nous reprenons ci-après les exemples donnés par l’administration au BOI-DJC-COVID19-20 nos 20 et 50, en les adaptant à la nouvelle période de suspension.

1. Une proposition de rectification adressée au contribuable le 15 décembre 2017 a valablement interrompu la prescription triennale au titre de l’année 2014 et ouvert un nouveau délai triennal pendant lequel l’administration peut mettre en recouvrement les impositions supplémentaires. Ce délai, qui expirait normalement le 31 décembre 2020, expirera le 14 juin 2021 (2017 + 3 ans + 165 jours).

2. Un contribuable qui a reçu le 4 mars 2020 la réponse de l’administration à ses observations suite à l’envoi d’une proposition de rectification dispose en vertu de l’article R 59-1 du LPF d’un délai de trente jours pour saisir la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires. La durée antérieure à la suspension étant de sept jours (soit du 5 au 11 mars 2020), le délai de trente jours sera échu vingt-trois jours (30 jours – 7 jours) après la fin de la période de suspension, soit le 15 septembre 2020. Le contribuable pourra donc saisir la commission jusqu’au 16 septembre 2020.

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6. Les délais prévus en matière de rescrits sont exclus de la prolongation de la durée de la suspension. Ils restent suspendus jusqu’au 23 juin 2020 à minuit. Sont concernés les délais prévus aux articles L 18 (rescrit-valeur), L 64 B (rescrit abus de droit), L 80 B (autres rescrits susceptibles d’aboutir à un accord tacite), L 80 C (rescrit mécénat) et L 80 CB (second examen) du LPF.

7. Enfin, l’ordonnance 2020-560 du 13 mai 2020 précise que les délais suspendus sont ceux prévus au titre II tant de la partie législative du LPF (première partie) que de ses deux parties réglementaires (deuxième et troisième parties).

A noter : Cette précision, présentée comme interprétative, confirme l’indication déjà donnée par l’administration (BOI-DJC-COVID19-20 no 30).

 

© Editions Francis Lefebvre 2020